La Mouche Noire ( The Fly )
Hélène Delambre, qui était pourtant très amoureuse de son mari André, s’accuse du meurtre de celui-ci... et un meurtre particulièrement horrible, en plus, puisqu’il a été écrasé dans son laboratoire par une presse hydraulique, actionnée à deux reprises ! Interrogée par un inspecteur de police et par son beau-frère, Hélène accepte de raconter l’incroyable vérité. Son mari, qui travaillait sur un dispositif de téléportation, avait décidé de le tester sur lui-même. Mais l’expérience avait mal tourné, à cause d’une simple mouche...
Pour les les amateurs d’horreur, La Mouche de David Cronenberg fait partie des films qui ont marqué l’histoire du genre. De plus, les films de SF horrifiques de qualité sont très peu nombreux et La Mouche Noire, de ce point de vue là, était un précurseur, bien longtemps avant Alien !
Il faut se replacer dans le contexte de 1958... la plupart des films de l’époque se focalisent, qui sur les dangers de l’arme nucléaire, qui sur la guerre froide et la menace d’un "ennemi intérieur" représenté dans la SF par des aliens à apparence humaine (comme dans L’Inavsion Des Profanateurs de Sépultures)... et voilà que débarque le film de Kurt Neumann, inspiré d’une nouvelle de George Langelaan publiée dans Playboy en 1957 !
A cette époque là, Star Trek n’existait même pas en tant que projet et la téléportation, il fallait y penser... et que dire d’un mélange accidentel des ADN de l’homme et d’une mouche qui se serait trouvée là par hasard ?
Cette idée de base, surprenante et originale en 1958, est le point commun des films de Kurt Neumann et de David Cronenberg. Pour le reste, les scénarii des deux films sont considérablement différents et ceux qui connaissent bien la version moderne de La Mouche découvriront sans doute avec plaisir un film finalement assez différent.
Alors que Cronenberg insistait sur la transformation physique de son personnage, induisant des comportements de plus en plus animaux et violents, cet aspect des choses n’est que suggéré dans La Mouche Noire. On voit bien qu’André Delambre lutte pour garder son humanité, mais cela ne va pas au delà, puisqu’il choisit de se donner la mort avant. En revanche, le film de Kurt Neumann joue davantage la carte du suspense, avec une chasse à la mouche qui pourrait permettre au héros de recouvrer son humanité (à la différence de la version de Cronenberg, l’homme et la mouche n’ont pas fusionné, mais chacun des deux est devenu mi-humain, mi-animal)... et d’innocenter sa femme, que personne ne croit et qui se retrouve donc soupçonnée de démence et accusée de meurtre ! Et le scénario, plutôt habile, réserve quelques surprises... jusqu’à cette scène finale à la fois émouvante et horrifique (surtout pour l’époque).
Les effets spéciaux, peu nombreux, sont plutôt réussis. La réalisation, qui suggère bien plus souvent qu’elle ne montre (ce qui renforce l’efficacité des rares scènes réellement explicites) est un modèle d’inventivité et de sobriété. L’acteur qui interprète André Delambre, lorsqu’il tente de maîtriser sa patte de mouche avec sa main humaine, illustre à la perfection cette manière d’exprimer beaucoup de choses avec très peu de moyens. La bande son est également remarquable, avec ce boudonnement (agaçant, mais utilisé à bon escient) qui ne cesse de rappeler la triste situation de la famille Delambre. Et Vincent Price, grand spécialiste du genre, fait lui aussi preuve de retenue et de sobriété (ce qui n’a pas toujours été le cas dans les nombreux films d’horreur auxquels il a participé).
A part son âge, il n’y a donc pas grand chose à reprocher à La Mouche Noire, qui est sans doute un des plus grands films de SF et d’horreur des années 50... comme La Mouche dans les années 80 !
Les photos présentées ici sont en noir et blanc, mais le film a bien été réalisé en couleurs !