300
Sur le fond… il n’y a pas grand-chose d’étrange concernant 300 ! La présence de ce film sur ce site est davantage justifiée par la forme, qui situe ce film à la pointe des technologies nouvelles du cinéma et à la frontière entre le légendaire et le fantastique. De la même manière qu’on pourrait considérer Les 10 Commandements comme un film fantastique, 300 va au-delà du peplum classique pour nous proposer une véritable lutte manichéenne, entre les braves spartiates et les ignobles perses …
La bataille des Thermopyles (qui sera désormais connue comme la bataille des 300 ...) est un morceau de l’histoire antique (c’était en - 480), au même titre que la bataille de Marathon. Un petit groupe de spartiates, grâce à leur courage et à une stratégie remarquable, a réussi à mettre en échec une armée perse infiniment supérieure en nombre, la retardant suffisamment longtemps pour permettre aux grecs de s’organiser et de stopper l’invasion perse, menée par Xerxès. Un morceau d’histoire très légèrement embelli par la technologie numérique utilisée par Zack Snyder…
On avait déjà vu ça dans le fameux Sin City de Robert Rodriguez, ainsi que dans le moins réussi The Spirit… deux polars très noirs mâtinés de fantastique, issus de l’univers des comics. Ici aussi, il s’agit de l’adaptation d’un comic, signé du fameux Frank Miller, auquel on doit notamment les évolutions modernes de Daredevil, de Batman et du Spirit (dont il fut également le réalisateur).
Décors et arrière plan numériques, traitement de la photo pour augmenter les contrastes, scènes d’action en mode ralenti / accéléré… On aime ou on n’aime pas mais force est de constater que Zack Snyder aurait pu aller plus loin, faire mieux (ou pire) dans le genre. Certes, l’aspect numérique du film se voit et c’est indéniablement volontaire. Mais Zack Snyder n’est pas pour autant tombé dans le piège de la surenchère, du spectaculaire à outrance. Finalement, la réalisation de 300 reste relativement réaliste, sobre, presque … spartiate ! Et Zack Snyder confirme, après L’Armée des Morts et avant Watchmen, qu’il est un réalisateur majeur.
Evidemment, l’action est reine. Une fois passé la première partie du film destinée à nous montrer l’éducation des guerriers spartiates (un classique du genre) et à justifier la situation invraisemblable de ces 300 guerriers partis se sacrifier (du fait d’une tradition interdisant à Sparte de partir en guerre en période de fête religieuse) la fleur à la lance (le fusil n’ayant pas encore été inventé …). C’est donc parti pour un massacre en règle des méchants perses (vu d’un point de vue américain, ce sont des arabes…) par les courageux spartiates (vu d’un point de vue américain, ce sont des européens…) ! Jusqu’à la fin qu’on imagine, évidemmment, tragique …
Au final, ça donne une bonne heure de violence quasiment non stop, mais non dénuée d’humour et de véritables moments de bravoure, dans tous les sens du terme. De ce point de vue là, 300 n’a quasiment aucun rival, aucun équivalent. Il faut remonter aux années 50 et à Zoulou de Cyril Renfield, un film qui n’a rien d’étrange (mais assez formidable), opposant en Afrique du Sud une centaine de soldats anglais regroupés dans un fort à une incroyable horde de 4000 zoulous, pour retrouver pareille ambiance et pareille tuerie débridée !
Au chapitre de l’étrange, on notera un loup au look bizarre et aux yeux rouges, des oracles spartiates ressemblant étrangement à l’empereur Palpatine, un Dieu-Roi plutôt impressionnant (avec la voix géniale de Bernard Gabay dans la VF), un soldat perse colossal et monstrueux, une unité d’élite appelée « les immortels » dont certain soldats semblent avoir des visages assez bizarres et un bourreau aux membres rappelant certains mollusques … Ce qui fait quand même beaucoup pour un peplum classique !
Mais ces choix sont justifiés par la voix off, censée nous conter les aventures de Leonidas (Gerard Butler, vu récemment dans Ultimate Game mais qu’on reconnaît difficilement derrière sa bare spartiate) et de ses 300 spartiates. Cette voix suggère qu’il s’agit certes d’une histoire vraie, mais peu à peu devenue une légende, et donc peut être un peu exagérée, embellie au fil des années, des siècles… un peu comme elle a été ici embellie par la technologie numérique. Il n’y a donc pas de quoi crier au scandale pour les historiens, d’autant que grâce à ce film, nos jeunes têtes blondes (ou brunes, ou rousses, ou autre ...) auront au moins un vernis de culture classique !
P.S. : pour la petite histoire le conseiller culturel du célèbre humoriste iranien Mahmoud Ahmadinejad a considéré ce film comme humiliant pour les perses et donc pour l’Iran d’aujourd’hui. Sur ce coup là, il faut avouer qu’il n’avait pas tout à fait tort...