Chroniques du Peuple (Pilgrimage : The Book of People)
On pourrait résumer l’oeuvre de Zenna Henderson à deux romans et quelques nouvelles... ce serait mathématiquement exact, mais loin de rendre compte de l’influence qu’a eu cet écrivain sur notre vision d’une certaine catégorie d’extra-terrestres. Des années 50 aux années 70 en effet, Zenna Henderson a publié 17 nouvelles (dont six sont regroupées dans les Chroniques du Peuple), qui sont autant de petits bijoux de la SF.
Le Peuple : c’est ainsi que ces extra-terrestres très semblables à nous se désignent. Très discrets depuis la destruction de leur Foyer et leur arrivée accidentelle sur Terre, ils vivent pour la plupart regroupés dans des villages paumés de l’amérique profonde, alors que d’autres vivent isolés parmi les humains, ignorant l’existence des autres survivants...
Avec les pouvoirs dont ils disposent (télépathie, télékinésie, lévitation etc) Ils pourraient probablement conquérir la planète... mais il n’en éprouvent aucunement l’envie ! Ce n’est tout simplement pas dans leur nature, ni dans leur culture.
Ils pourraient facilement se fondre dans la population et passer inaperçus, mais ils préfèrent généralement vivre entre eux et préserver leur mode de vie en limitant au maximum les contacts avec l’extérieur et "les extérieurs" (c’est ainsi qu’ils désignent les humains d’origine terrestre).
Toutefois, lorsque l’occasion se présente, ils n’hésitent pas à venir en aide aux humains. C’est le cas avec Lea, une jeune femme au bord du suicide, qui se retrouve prise en charge par Karen, qui va lui faire subir une véritable thérapie, sous forme d’histoires qui vont lui être racontées par différentes personnes du Peuple, jusqu’à ce qu’elle découvre la véritable raison de son état dépressif...
On pourrait croire à la lecture de ce résumé que Zenna Henderson se contente d’imaginer de gentilles histoires de pouvoirs psychiques... alors que ses nouvelles vont bien au delà de cela, en développant des thèmes récurrents universels tels que l’isolation et ses conséquences, la tolérance et le droit à la différence, la vie en petite communauté, l’éducation, la religion...
La plupart de ses personnages sont jeunes et tourmentés. Ce sont souvent des institutrices ( il se trouve que c’était le métier de Zenna Henderson)... ou des élèves ! Ce sont par exemple une jeune institutrice qui, curieusement, va se sentir très à l’aise parmi ces étranges élèves capable de faire léviter les morceaux de craie et de se déplacer en flottant dans l’air... Deux jeunes enfants, issus d’un couple mixtes d’un terrien et d’une femme du Peuple et élevés parmi les humains, dans la crainte d’être découverts... une autre institutrice qui essaie de réveiller une bien étrange classe d’enfants trop sages et trop obéissants, visiblement inhibés, qui tentent visiblement de cacher quelque chose... encore une institutrice, qui va se rendre compte qu’elle possède certains des dons de ses élèves, alors qu’elle est pourtant une terrienne pure souche... un petit orphelin au bord de la déliquance, qui ne parvient pas à trouver sa place, ignorant qui il est et d’où il vient ...
Sans lasers ni vaisseaux spatiaux, Zenna Henderson nous donne avec ces extra-terrestres du Peuple une très belle réflexion sur la nature humaine, avec beaucoup de sensibilité, au travers de textes souvent émouvants. Toutes ses nouvelles se terminent miraculeusement bien, et sa vision de l’humanité s’avère finalement résolument positive, très optimiste, peut être même naïve ... mais comment pourrait-on le lui reprocher ?
Il est difficile, en lisant ces nouvelles, de ne pas se souvenir du film La Montagne Ensorcelée, sorti en 1975 et inspiré d’un roman d’Alexander Key sorti en 1968. A mon humble avis, si Zenna Henderson avait figuré au générique du film, il n’y aurait pas eu scandale ...
Avis aux amateurs de raretés : il existe un téléfilm "The People" inspiré de la saga du Peuple, diffusé par ABC en 1972 avec un certain William Shatner (qui retrouvait pour l’occasion l’actrice qui était Miri dans l’épisode du même nom de Star Trek). Mais quelque chose me dit qu’il ne doit pas être facile à trouver !