Les Mondes Futurs (Things to Come)
En 1940, une guerre mondiale éclate et dure 25 ans, prolongée par une terrible épidémie. Les survivants ont presque tout oublié de la technologie et la civilisation humaine est en ruines, réduite à quelques tribus dirigées par des dictateurs médiocres... jusqu’au jour où un étrange avion se pose, amenant un pilote annonçant qu’une organisation est en train de rebâtir la civilisation. Le progrès reprend sa marche en avant, l’humanité vit dans la paix et la prospérité et la conquête de l’espace peut commencer ...
Ce qui frappe le plus dans ce film, c’est son caractère universel, avec une étonnante capacité à toucher tous les spectateurs, quelle que soit leur origine. C’est voulu, indéniablement. Et c’est réussi. Il ya une guerre, mais on ne sait à aucun moment quels camps s’opposent. Il y a des images d’archives, habilement mélangées à des images de fiction... qui ne disent rien des nations qui sont en guerre. Aucun drapeau, aucun insigne n’est visible. Et la quasi totalité du film se déroule dans une ville qui s’appelle Everytown, qui pourrait aussi bien être Londres, Washington, Paris ou Rome, que l’on voit évoluer sur plus une centaine d’années, d’abord détruite, puis reconstruite.
Prévoir dans les années 30 une seconde guerre mondiale, quelques années après la fin de la première, n’avait rien d’un exploit. Imaginer que la guerre pourrait durer jusqu’en 1965 (avec la guerre froide, qui était toutefois nettement plus chaude en Corée puis au Vietnam, on est même allé un peu au delà ...), c’était en revanche bien vu. De même que l’idée d’une arme biologique de destruction massive (l’épidémie du "mal des vagabonds") ! Mais H.G. Wells et William Cameron Menzies (également réalisateur des Envahisseurs de la Planète Rouge en 1953) vont plus loin dans l’anticipation : lorsque la civilisation redémarre, on s’aperçoit que le progrès technologique est mal vécu par une partie de la population, qui voudrait bien dire "stop"...
Mais ce sont les scientifiques qui dirigent le monde et mènent désormais la civilisation toujours plus haut, toujours plus loin... C’est un peu la limite de cette SF du début du siècle dernier, pour laquelle le progrès scientifique et technique était une fin en soi, les scientifiques étant destinés à diriger le monde... et qui ne s’intéressait que de très loin au sort des "petites gens" ! On sait bien aujourd’hui que les scientifiques sont restés à leur place, que le véritable pouvoir est détenu par des sphères économiques et politiques étroitement mêlées et que l’immense majorité des être humains subit péniblement une évolution technologique qui ne fait plus rêver grand monde ...
Il n’empêche que, même en sachant que le futur (notre présent, en fait) n’a pas grand chose à voir avec celui imaginé dans le film, celui-ci passionnant, tant il diffère de ceux que l’on a l’habitude de voir, aussi bien sur la forme que sur le fond, avec des personnages qui ne font que passer et les questions philosophiques qu’il soulève. Et on ne peut s’empêcher de s’émerveiller devant ces effets spéciaux d’un autre âge mais néanmoins réussis et spectaculaires. De ce point de vue là, Les Mondes Futurs n’a rien à envier au célèbre Métropolis... si ce n’est sa célébrité, justement ! Car le film de William Cameron Menzies mérite largement le détour, tout autant que le film de Fritz Lang.
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