Le Livre De La Mort
13 textes sur la mort : ce qui se passe avant (la maladie, sa souffrance, l’agonie...), la mort elle-même, ce qui se passe après (lé décomposition, l’utilisation des cadavres) et les différents lieux dans lesquels tout cela se joue (hôpital, faculté de médecine, morgue, cimetière). Macabre mais évidemment fascinant, pas exempts de défauts non plus, ce recueil de nouvelles était aussi une rareté qui méritait d’être sauvée de l’oubli. C’est désormais chose faite grâce aux éditions La Clef d’Argent et à Philippe Gindre.
Il faut se souvenir en lisant Le Livre De La Mort qu’il a été écrit au début du siècle dernier, avec ce que cela implique en termes de vocabulaire, de tournures de phrases mais aussi en termes de contenu, le fantastique (et l’horreur encore plus) en étant encore à ses balbutiements.
A cette époque là, les psychologues pour enfants ne sévissaient pas encore, que ce soit dans leurs cabinets ou par l’intermédiaire de leurs livres... et c’est sans doute ce qui explique qu’Edouard Ganche a été très tôt confronté à la maladie et à la mort, puisque son père médecin a commencé à l’emmener avec lui lors de ses visites bien avant ses dix ans. Le résultat ? Ni plus ni moins qu’un gamin traumatisé et désormais obsédé par la mort, comme le démontre à l’évidence son recueil de nouvelles !
Car ce qui ressort avant tout de ces 13 textes, c’est une fascination morbide pour tout ce qui touche de près à la mort, en même temps qu’une véritable angoisse et un véritable dégoût. De ce point de vue là, la sincérité de l’auteur, ne fait aucun doute, il ne s’agit pas d’un exercice de style, bien que le concept même d’un tel recueil thématique de nouvelles soit plutôt original.
Ce qui ressort aussi des nouvelles de Ganche, c’est un profond athéisme (d’où l’angoisse, peut être...) et des préoccupations sociales qui reviennent assez régulièrement, l’auteur dénonçant les inégalités devant la maladie, la souffrance et même après la mort ! Comme quoi rien n’a vraiment changé sur les 100 dernières années.
Sur la plan littéraire, on regrettera quand même une certain nombre de lourdeurs et surtout de répétitions, qui semblent revenir sans cesse nouvelle après nouvelle, avec des notamment des passages quasi-systématiques et pas toujours indispensables sur la décomposition et le pourrissement des corps...
La fascination de Ganche pour ces phénomènes, pour la vision de ce que peut révéler l’intérieur d’un corps humain ouvert, sont tels qu’ils se désintéresse totalement de ses personnages et en oublie parfois de nous raconter une histoire ! C’est moins vrai sur des nouvelles comme l’Agonie, Le Poussah, Enterrée Vive ou Le Syphilitique... mais Une Autopsie à La Morgue, Le Squelette L’Opérée ou La Tête de Mort ressemblent davantage à ce qu’on pourrait trouver dans le journal intime d’un étudiant en médecine ou à un article de journaliste, purement descriptif, qu’à une véritable nouvelle.
Et le fantastique dans tout ça ? Il y en a un peu, mais c’est clairement davantage un élément du décor que le coeur de ces nouvelles, qui ne s’intéressent nullement à la vie après la mort, aux esprits et autres manifestations venue de l’au-delà. Ce qui obsédait l’auteur, à l’évidence, ce n’était pas la Mort avec un M majuscule, mais bien la mort banale et ordinaire qui nous attends tous...
Alors faut-il lire Le Livre De La Mort ? J’ai bien évidemment un avis sur la question... Mais s’agissant d’un sujet aussi grave, personnel et donc éminemment subjectif, je préfère laisser le soin à chacun de décider s’il a envie de plonger dans l’univers imaginé par Edouard Ganche.