Docteur Sleep
Les années ont passé et Danny a grandi, avec sa mère qui ne se s’est jamais vraiment remise des événements qui ont lieu dans l’hôtel Overlook... et Danny non plus. Alccolique, Après plusieurs années d’errances, Danny touche le fond peu de temps avant d’arriver à Frazier, une petite ville du New Hampshire dans laquelle il va tenter de remonter la pente, aidé par deux membres des Alcooliques Anonymes. Mais sans l’alcool pour l’anesthésier, son don très particulier se manifeste à nouveau et le met en rapport avec une jeune fille, Abra, particulièrement puissante. Malheureusement pour elle, Abra a également été repérée par des créatures redoutables, qui se nourrissent du pouvoir d’enfants comme elle...
Si on en croit la légence que Stephen King se plait à écrire lui-même (mais après tout, pourquoi pas ?), l’idée d’écrire une sorte de suite à Shining serait venue d’un fan qui lui aurait demandé un jour ce qui est arrivé au petit Danny Torrance après l’incendie de l’Overlook et la mort de son père...
Une bonne idée, qui permet aux fans de King de renouer avec le genre de roman l’ayant rendu célèbre. Ces dernières années, en effet, King nous a habitués à des romans utilisant le fantastique ou la SF avant tout comme un prétexte pour aborder des sujets plus profonds (et généralement plus ou moins autobiographiques) : nostalgie des années 60, création artistique, critique de la société américaine moderne, difficultés liées à un handicap suite à un accident...
On retrouve certes dans Docteur Sleep des éléments autobiographiques, avec l’alcoolisme du personnage principal qui fait écho à celui, ancien, de l’écrivain... mais en dépit de la publicité qui en a été faite lors de sa venue en France, c’est loin d’être le sujet central du roman, qui s’avère être un bon vieux roman de fantastique / horreur traditionnel, du genre que King affectionnait à l’époque de Simetierre, Ca, Salem, ou Christine.
Pour la première fois depuis longtemps, on a l’impression que l’écrivain a apporté un soin particulier à son intrigue - on a envie de dire son scénario, sachant que le roman sera sans doute adapté au cinéma - afin de maintenir le suspense à son comble tout en réservant au lecteur des surprises et des rebondissements. Car la lutte de Dan et Abra contre les Vrais, ces vampires psychiques, est bien le seul et unique enjeu du roman.
La véritable originalité de Docteur Sleep réside d’ailleurs dans la manière dont King traite ce combat. La plupart des écrivains se seraient contentés de faire de la jeune fille une victime de ses ennemis, sauvée de justesse par son ami Dan... mais Stepen King renverse très vite la situation en transformant Abra en une véritable prédatrice qui se met en chasse pour éliminer ses proies et venger toutes leurs victimes précédentes.
Quant aux Vrais, en dépit de leurs actes monstrueux, King finit presque par nous les rendre sympathiques tant il s’intéresse à eux, à leur passé, leur mode de vie, leurs histoires d’amour, leurs problèmes. C’est assez nouveau dans l’oeuvre de King, qui avait plutôt tendance à nous présenter des personnages en lutte avec le mal absolu... et qui nous montre ici que même le mal absolu peut avoir des émotions humaines et des côtés attachants. Mais rassurez-vous : son héroïne, elle, est sans pitié...